Entre les murs du Couvent de Santa Catalina

Nous avons visité le couvent de Santa Catalina le dernier jour de notre séjour à Arequipa. Depuis la rue, on ne voit rien, juste un haut mur blanc qui se dresse sur des centaines de mètres. Le couvent est construit comme un village à l’intérieur de la ville – il s’agit du plus grand couvent au monde – et il accueille toujours des sœurs actuellement. Elles vivent désormais dans une autre partie du couvent, avec l’eau et l’électricité (donc plus moderne), alors que les anciens bâtiments sont accessibles au public.

Une fois à l’intérieur, les couleurs ravissent les yeux. On en trouve principalement 3 : du jaune, de l’orange et du bleu, il s’agit de pigments naturels qui rappellent l’époque coloniale.

Entrée du couvent

De nombreuses cours pavées et jardins structurent l’ensemble du monastère. On peut y admirer des orangers (qui symbolisent la vie éternelle) ou encore des Kantutas – la fleur sacrée des incas, aujourd’hui fleur nationale du Pérou.

Cour intérieure #1
Cour intérieure #2
Dans les rues du couvent #1
Dans les rues du couvent #2
Jardin principal
Kantuta (à droite), la fleur nationale du Pérou

Nous avons opté pour une visite guidée et avons appris plein de détails intéressants sur la vie des sœurs à l’époque.

Le monastère a été fondé en 1579, à cette période c’était un monastère prestigieux qui pouvait accueillir jusqu’à 170 sœurs (il en reste moins de 50 aujourd’hui).

Lorsqu’une jeune fille entrait au couvent, elle avait ensuite interdiction d’en sortir jusqu’à la fin de la vie. Il existait un parloir qui lui permettait de communiquer avec l’extérieur une fois par mois. Elle pouvait aussi échanger certains objets (de la nourriture par exemple) mais certains étaient interdits comme les miroirs, qui représentaient le pêché de vanité. Afin d’assurer un contrôle, les sœurs venaient toujours 2 par 2 au parloir – l’une étant présente pour surveiller les discussions de l’autre. Une ambiance sympathique…

Le parloir

Les sorties étaient extrêmement rares (la plupart n’y avaient pas droit), mais lorsque cela arrivait, les sœurs devaient prendre un bain de purification à leur retour au monastère. Franchement ça ne donne pas envie, c’était peut être mieux de ne pas sortir en fait !

Bain de purification

À l’époque on rentrait au couvent à partir de 12 ans. Généralement, c’était le 2ème enfant qui était désigné pour devenir religieux : le 1er devait se marier (on choisissait bien sûr pour lui avec qui), le 2ème entrait dans les ordres afin d’assurer le paradis à toute la famille et le 3ème restait avec les parents pour s’en occuper. Je ne sais pas à quelle place j’aurais préféré me trouver… (la 3ème bien sûr Maman et Papa 🙂 désolée pour le paradis).
Il ne s’agissait donc pas seulement d’un endroit pour les femmes ayant une vocation.

Le long des couloirs, on trouve de nombreuses peintures représentant les litanies. Ces peintures n’étaient pas seulement présentes à titre décoratif, mais parce que les femmes à cette époque ne savaient ni lire ni écrire. C’était donc l’unique moyen pour elle de comprendre ces litanies.

Litanies

La vie des sœurs était composée de 2 périodes :
– Avant de prononcer ses voeux : pendant un an la jeune novice était cloîtrée dans une pièce et ne voyait personne à part la mère supérieure. Pendant cette période, elle portait un habit blanc et devait réfléchir à son engagement afin d’être prête le moment venu.

– Une fois les vœux prononcés : la jeune fille revêtait les habits traditionnels des sœurs (la toge noire) et avait sa propre petite maison à l’intérieur du monastère. Celle-ci dépendait de la fortune de sa famille, certaines vivaient donc dans de grandes maisons équipées de poêles à bois, d’un propre four à pain et disposaient de plusieurs servantes (pas très catholique tout ça), alors que d’autres partageaient leurs maisons et leurs chambres. Elles pouvaient mener une vie sociale à l’intérieur du monastère et s’inviter à dîner entre elles une fois leurs vœux prononcés.

Au total, 80 maisons sont présentes dans le monastère. Dans chacune d’elle, le lit se trouve sous une sort de niche. La région d’Arequipa est propice aux séismes et il s’agissait de l’endroit le plus sûr où se réfugier.
Le 19 février 1600 le monastère a d’ailleurs été détruit suite à un double tremblement de terre. Il fut reconstruit avec l’aide des habitants de la ville.

La chambre d’une des sœurs, elles sont toutes aménagées selon le même modèle
Cour intérieure d’une maison

Une des pièces du monastère accueille des portraits des sœurs de l’époque, ces portraits ont en fait été réalisés à leur mort afin de ne pas pouvoir succomber au pêché de vanité (toujours le même). Elles ont triste mine, c’est à la limite du glauque ! Un cimetière fait aussi partie du couvent, on vivait ici complètement indépendamment de l’extérieur.

Le cimetière à l’intérieur du couvent

La cantine était, avec l’église, le lieu où se rassemblait toutes les sœurs. Chaque jour, une sœur était désignée pour lire la prière pendant le repas. Ce jour là, elle pratiquait le jeûne. Manger ou lire, il faut choisir…

Quelques systèmes ingénieux étaient utilisés dans le cadre de la vie quotidienne :
Dans les pièces sombres, des ouvertures au plafond permettaient de faire entrer la lumière, celle-ci se reflétait ensuite sur de grands draps blancs posés au sol.

Puit de lumière

Des pierres volcaniques permettaient de filtrer l’eau et la rendre potable. Cela pouvait prendre une journée pour remplir une simple jarre, il fallait donc être prévoyant.

Le monastère aujourd’hui
Il accueille toujours des religieuses mais les règles ont quelque peu évoluées. Heureusement ! Les jeunes filles ne peuvent entrer qu’après leurs 18 ans, il n’y a plus de dot à payer et 8 ans de préparation sont nécessaires avant la prononciation de ses vœux, cela permet aux nocives de bien réfléchir à leur engagement et de pouvoir changer d’avis (apparemment cela n’arrive pas souvent).

Elles peuvent accéder à la technologie, en revanche les sorties sont toujours exceptionnelles (autorisation de rendre visite à un être cher mourant ou d’aller chez le médecin par exemple) et elles sont toujours 2 par 2 lorsqu’elles sortent à l’extérieur. Concernant la vanité, pour le miroir on ne sait pas, et pour Instagram ça doit être vraiment compliqué !

La plus jeune sœur a 23 ans et la plus « âgée » 66 ans, mais la moyenne d’âge est de 30 ans ce qui est relativement jeune…

Fontaine autour de laquelle les sœurs se retrouvent après la messe du dimanche
Une des sœurs vivant actuellement au couvent

Enfin, une sœur du couvent a été béatifiée par Jean Paul 2, il s’agit de Santa Ana (morte en 1686) qui aurait réussi à soigner plusieurs mourants.

Le couvent de Santa Catalina est vraiment un endroit à visiter si vous passez par Arequipa, les décors et les couleurs sont un vrai enchantement et on se sent hors du temps…

Vue depuis les toits du couvent

1 Comment

  1. On est ravis d’avoir visité avec vous cet endroit exceptionnel , en dehors du temps et superbe tant par l’architecture que par la végétation. En revanche, y vivre ne semble pas évident…

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