Valparaiso, ville de caractère et de couleurs

Après notre excursion au Salar d’Uyuni nous partons pour Valparaiso, sur la côte centre du Chili, afin d’y passer les derniers jours de l’année. La ville est réputée pour ses fêtes et son feu d’artifice du 31 décembre, c’est donc le point de chute idéal pour passer nos derniers moments en Amérique du Sud.

Il faut se promener et se perdre dans les rues de Valparaiso afin d’admirer sa beauté et de profiter de son atmosphère et sa créativité. Les habitants, que l’on appelle les porteños, nous sont apparus plus enjoués et plus accueillants que dans le reste du pays, n’hésitant pas à nous aider à trouver notre chemin ou à nous conseiller d’éviter certaines rues peu fréquentables.

Tour en bateau
À peine arrivés à Valparaiso, nous sautons dans un bateau afin d’admirer la ville depuis la mer. On dit que c’est le meilleur moyen de comprendre comment elle est construite et de se rendre compte de son étendue. On peut ainsi observer les nombreuses collines qui la composent ainsi que ses bâtiments principaux.

Le joli port de Valparaiso
Depuis notre bateau

Ce qui est intéressant c’est aussi la visite du port, on passe à la fois devant des bateaux de pêcheurs, des navires de guerre et le port autonome. D’énormes portiques chargent des conteneurs sur des bateaux de plus de centaines de mètres de long. Certains peuvent supporter jusqu’à 9 000 conteneurs… Depuis notre petit bateau on ne fait pas le poids ! Ça me fait penser au Havre… sauf que là-bas on ne peut pas s’approcher d’aussi près.

Porte conteneurs géant

Les navires de guerre sont, eux, au repos. Sur les ponts nous avons pu apercevoir les charges des feux d’artifice qui ont été installées en prévision du 31 décembre.

Navires de guerre
Un joli voilier
On croise aussi des éléphants de mer 🙂

Architecture et histoire
La ville est composée de 42 collines (en tous cas c’est le chiffre officiel) sur lesquelles vivent environ 95% des habitants. Elle est construite un peu à la manière d’un amphithéâtre : les collines forment les gradins et l’océan représente la scène.
Pour se déplacer, les habitants ont construit des funiculaires (elevador) qui font aujourd’hui partie du patrimoine culturel. Il en existait 32 dans le passé mais seuls 7 fonctionnent encore aujourd’hui. Ils ont commencé à fermer avec l’arrivée des nouvelles technologies mais aussi à cause des catastrophes naturelles qui touchent régulièrement la ville : incendies, tremblements de terre… Malgré son aspect de ville « bricolée », Valparaiso est plutôt bien préparée aux tremblements de terre. Le Chili est le pays le plus sismique du monde, le dernier plus gros en date a eu lieu en 1953 et fut d’une intensité de 9,5. On a du mal à imaginer la violence subie par les habitants lors de cet événement.

Un des nombreux escaliers qui rejoint le haut des collines
Elevador Reina Victoria

Ce qui fait le charme de Valparaiso, c’est son architecture si particulière. Ici il n’existe pas vraiment de règles d’urbanisme, chacun fait comme il veut, et surtout comme il peut pour s’adapter à la forme du terrain. Dans certains quartiers, des immeubles vieux de 200 ans côtoient de nouveaux bâtiments design en bois et en zinc. Les propriétaires rivalisent d’imagination en ce qui concerne la couleur des murs extérieurs de leur maison et le street art habille les moindres recoins des rues (marches d’escaliers, toits, murs à l’abandon…).

Escaliers en mosaïque

Valparaiso est une ville portuaire qui a été créé en 1536, elle conserve de nombreuses traces de son histoire liée aux marins. Par exemple on y trouve de nombreuses maisons en forme de navires et la plupart sont recouvertes avec une sorte de tôle ondulée provenant des anciennes coques des cargos, cela permettait de ne pas gâcher les matériaux et de renforcer l’isolation des habitations. On dit aussi que la couleur, si typique des maisons d’ici, viendrait des marins : ils partaient plusieurs mois en mer et avaient besoin de pouvoir repérer leur maison depuis leur bateau lorsqu’ils rentraient au port. Ils choisissaient donc une couleur bien particulière et qui ne ressemblait surtout pas à celle du voisin. Les numéros de rue n’existaient pas à cette époque et cela facilitait en même temps la façon de se repérer pour les habitants.

Un arc-en-ciel de maisons

À flanc de colline on tombe sur des « casas mentirosas », ce sont des maisons qui mentent… On les appelle comme cela car depuis la rue on croirait qu’elles ont un seul étage, alors que plusieurs autres que l’on ne voit pas sont cachés au-dessous.

Depuis 2003, Valparaiso est classée au Patrimoine Mondial de l’UNESCO, enfin seulement 80% de la ville : 2 des 42 collines ne sont pas concernées (donc pas protégées) ; par conséquence, de grandes tours continuent d’être construites et gâchent une partie du paysage.

Même si c’est difficile à percevoir aujourd’hui, Valparaiso à été la ville la plus riche du Chili et d’Amérique du Sud pendant de nombreuses années. C’était à l’époque le dernier port avant l’océan Pacifique et le premier avant l’Atlantique selon l’endroit où l’on se trouvait. Le déclin de la ville à commencé au moment où le canal de Panama a été inauguré, rendant alors cet arrêt sans intérêt.

Valparaiso était donc un port très important au 19ème siècle et a accueilli de nombreux immigrés d’Europe (anglais, français, italiens, croates…), chacun apportant ses mœurs et ses coutumes. D’ailleurs Valparaiso nous a semblé être un joyeux mélange entre Lisbonne, Amsterdam et Brighton.

Cet hôtel se nomme d’ailleurs « Brighton »

La seule religion tolérée à l’époque était le catholicisme mais tous vivaient de façon respectueuses avec les anglicans et les juifs qui se sont installés ici. Sur le Cerro Concepcion, une église secrète à été construite par les anglicans. De l’extérieur elle ressemble à un bâtiment lambda, aucun signe religieux n’est présent car il ne fallait pas se faire repérer.

Street art
Le street art est arrivé à Valparaiso à l’époque de la dictature, c’était alors un moyen pour les étudiants de protester contre le régime. Ils devaient être malins pour ne pas se faire repérer par les soldats car ils risquaient leur vie, certains devaient donc monter la garde pendant que les autres peignaient les murs. Anticastro est l’un des artistes les plus célèbres aujourd’hui, il utilise aujourd’hui des drones pour voir de loin ce qu’il peint. On trouve aussi de nombreuses œuvres de Un Kolor Distincto, El Chilote ou encore Abso. Chacun a son propre style et s’attaque à un sujet différent : la dénonciation des lois concernant la pêche au Chili, la dualité entre l’homme et la femme, les origines et le brassage des différentes cultures d’Amérique du Sud… Au delà du plaisir que l’on a à les regarder, il y a beaucoup de choses à apprendre lorsque l’on lit à travers les lignes.

Fabien s’est fait un nouvel ami ici

Cerro Alegre et Concepcion
Ce sont les quartiers les plus anciens de la ville et aussi les plus touristiques. Cela ne doit pas être les plus représentatifs mais pourtant il fait bon s’y promener pour admirer le street art, écouter la musique de rue, déguster une glace ou encore s’arrêter prendre un café en terrasse. Le Cerro Alegre tient son nom du temps de l’arrivée des anglais à Valparaiso. Ils avaient apporté leurs coutumes en venant ici : le jardinage et la plantation de fleurs, les peintures de couleur… Ils se sont mis à appeler ce quartier le « Mont Pleasant », qui s’est transformé dans la traduction en Cerro Alegre. Le Cerro Concepcion se trouve lui à l’intérieur du Cerro Alegre, ce n’est donc pas vraiment un Cerro à proprement parler.

Cerro Concepcion
On a goûté aux meilleures empañadas de Valparaiso !

Cerro Carcel
Au sommet du Cerro Carcel on peut apercevoir un grand cimetière, phénomène assez curieux pour un centre ville. En fait ce sont 3 cimetières qui se suivent en enfilade. L’histoire raconte que dans le passé, un grand tremblement de terre a fait s’effondrer la moitié de la colline et que les habitants ont trouvé des os et des corps en rentrant chez eux après la catastrophe. Depuis, les habitants verraient les fantômes des morts qui sont tombés dans leur maison…
Un peu plus loin, on trouve le Parque Cultural. Les locaux sont installés entre les anciens murs de la prison de la ville (d’où le nom de Cerro Carcel) et accueillent aujourd’hui les projets artistiques et les œuvres des étudiants de Valparaiso.

Maison de Pablo Neruda
Le plus célèbre des poètes chiliens possède une maison dans les hauteurs de la ville. En 1959, il rachète un grand bâtiment avec une vue somptueuse sur la ville et sur le port et finit de le faire construire.

Une drôle de maison

Chaque pièce possède sa propre personnalité et à été décorée avec beaucoup de goût. Dans l’entrée on trouve un grand vitrail ainsi qu’une fresque en pierre représentant la Patagonie. À l’étage supérieur se trouvent le salon au milieu duquel trône une grande cheminée et le bar qui regorge de pièces uniques, comme des verres en cristal ayant appartenus au Tsar Nicolas 2.
L’escalier menant au 3ème étage est habillé de rayures rouges et blanches et de petits hublots donnent sur l’extérieur.
La chambre et la salle de bain se trouvent au 4ème étage. Elles sont elles aussi très originales et regorgent d’objets d’art : des panneaux en bois en provenance d’Asie, des meubles chinés dans des bateaux, des lustres en Crystal…

Le lit du poète

Enfin le 5ème et dernier étage accueillait le bureau et lieu de travail du poète. La porte d’entrée est en verre coloré alors qu’à l’intérieur on trouve un secretaire français, un lavabo en porcelaine anglaise et de nombreuses représentations d’armatures de bateaux.

La porte permettant d’accéder au bureau

À chaque étage de la maison, la vue invite au rêve et à l’observation…

Pas mal la vue depuis la maison de Pablo…
Dans la rue de Pablo

Musée à ciel ouvert
Le musée à ciel ouvert se trouve à quelques pas de la maison de Pablo Neruda. Pour tout vous avouer nous n’avons pas vraiment compris pourquoi ce lieu était tant plébiscité. Certes on y trouve de nombreuses fresques sur les murs des rues, mais comme partout ailleurs dans la ville. C’est donc un bel endroit mais c’est loin d’être un incontournable.

Maisons colorées sur la route du musée à ciel ouvert
Poteaux colorés #1
Poteaux colorés #2

Les problèmes auxquels la ville doit faire face aujourd’hui
⁃ Les chiens errants : c’est l’un des principaux fléaux qui touchent la ville. Il y en aurait plus de 12 000 et parfois la situation devient incontrôlable car ils prennent véritablement le contrôle de certaines rues. Lors de notre séjour, nous avons vu des chiens empêcher des voitures de passer à certains endroits… La majorité reste cependant inoffensive et se contente de suivre les touristes pour quelques pas. Cela fait mal au cœur de voir autant de chiens mourir de faim mais on comprend aisément que ce n’est pas possible de tous les sauver. Certains habitants ont installé des petites niches dans la rue et invitent les passants à déposer des croquettes.

Hôtel pour chiens
Le chien qui nous a suivi tout au long de la visite guidée de la ville

⁃ Les ordures : la ville en est pleine. Peu de moyens de recyclage sont mis en place mais à priori c’est en train de changer et beaucoup de campagnes de sensibilisation sont menées par la mairie dans les écoles.
⁃ Les incendies : chaque jour les sirènes des pompiers résonnent dans la ville. Il existe de nombreuses raisons différentes pour expliquer ce problème : beaucoup de maisons sont encore en bois, la ville est régulièrement balayée par des vents violents, le manque de plan architectural rend le travail des pompiers impossible à certains endroits (rues trop étroites), les câbles électriques ne sont pas tous aux normes, et enfin le réchauffement climatique qui a contribué à l’élaboration des températures de plusieurs degrés en quelques années.

Depuis les terrasses…
C’est le meilleur endroit pour pouvoir admirer les maisons aux couleurs vives, les habitants qui profitent du soleil depuis leurs toits, ainsi que les allers et venues des bateaux dans le port. Les Cerro Alegre et Concepcion en comptent des dizaines et nous en avons largement profité pendant notre séjour.

Vue depuis les hauteurs
Bière locale
Notre dîner de Noël un peu en retard 😉

Un fin d’année enchanteresse
Nous terminons cette année 2017 sur les hauteurs de Valparaiso, avec une vue donnant sur la mer. D’ici nous admirons pendant plus d’une demi heure les feux d’artifice lancés depuis les bateaux. Au loin, on aperçoit les feux tirés par les autres villes de la baie. Les gens chantent et crient leur joie, c’est une belle journée et une belle année qui s’achève pour nous. La prochaine s’annonce également pleine de découvertes de promesses.

Un feu d’artifice grandiose
Nous sommes les derniers à passer en 2018 🙂

Nous avons beaucoup aimé Valparaiso, malgré sa réputation assez mitigée la ville nous est apparue pleine de charme, de secrets et chargée d’histoire.
Nous terminons ici notre séjour de 4 mois en Amérique du Sud, c’est avec un peu de mélancolie que nous partons car nous n’avons eu de cesse de faire de belles rencontres et de découvrir des paysages somptueux depuis notre arrivée. Nous changeons de cap et prenons l’avion pour la Nouvelle-Zélande, nul doute qu’elle nous réserve également de belles surprises et des moments d’admiration.

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